 |
Le camp de Royalieu à Compiègne. |
A
1 heure 30 du matin le camp est bombardé par un ou deux avions, non identifiés.
Plusieurs 45000 ont décrit ce bombardement et ses conséquences.
Le bombardement s'est produit deux jours après l’évasion, dans la
nuit du 21 au 22 juin, par un
souterrain de
quarante mètres,
de 19 responsables et
militants communistes . Lire
dans ce blog : 22
juin 1942 : évasion de 19 internés. Ils considèrent que ce bombardement fait partie des représailles allemandes à l'évasion. Des sanctions avaient été prises dès le 22 juin.
Punitions
et représailles
André Poirmeur : « Compiègne 1939-1945 », Telliez 1968, page 128 : « Le lendemain Jaeger déchaîné lança ses chiens sur la piste des fuyards, sans succès. Des généraux dont von Stulpnagel et un état-major d'officiers nazis vinrent enquêter sur place étant donné la personnalité des évadés et furent stupéfaits par le magnifique travail accompli. Le Kommandant Pelzer et le Feldwebel jurèrent qu'on ne les y prendrait plus et infligèrent des sanctions rigoureuses à l'ensemble des internés considérés comme complices : trois heures de marche par jour dans le camp, mise au secret, brimades de toutes sortes furent leur lot pendant plus d'un mois ».
Henri
Gaget : Comme sanction, nous eûmes la suppression du théâtre, des
cours, conférences, jeux, sports, des pelles, réchauds etc… Le
courrier fut limité à une lettre et deux cartes par mois. On nous
fit déménager à nouveau du bâtiment 6 et loger 52 par chambre, où
il doit y avoir 16 soldats ».
Témoignages sur le bombardement du camp
Sur les 14 bombes comptées par
Henri
Gaget ,
13
sont tombées sur le camp des politiques, dont une à retardement, ce
qui fait du camp A la cible principale et ont endommagé deux
bâtiments (A3 et A5) faisant des blessés parmi les internés,
dont Télesphore
Lalouette et Gaston
Vergne.
Une
seule bombe a touché le camp anglo-saxon. Elle est tombée sur les
bâtiments B5 et B6, faisant trois morts et de nombreux blessés.
Par
ailleurs, dans l’hypothèse (rarement retenue) où il aurait pu
s’agir d’un bombardement anglais, il convient de souligner que
les bombardements menée par la RAF en France en 1942 visent
essentiellement des nœuds ferroviaires et des usines travaillant
pour l’armée allemande.
Le
bombardement des usines Renault des 3 et 4 mars 1942 est de plus suivi deux jours
plus tard d’un lâcher de tracts qui mettent en cause les
productions de chars réalisées à Billancourt et livrées aux
Allemands, et annoncent la destruction de toutes les usines
travaillant pour le Reich.
Exceptées les citations du livre d'André Poirmeur, tous les témoignages qui suivent proviennent des futurs déportés du convoi du 6 juillet 1942.
André
Poirmeur
écrit (« Compiègne
1939-1945 », Telliez
1968, p. 119) « Des
avions inconnus (mais chacun était convaincu qu’ils étaient
allemands et usaient de représailles au lendemain de la fameuse
évasion des 19 communistes) larguèrent dans ce secteur anglo-saxon
vers deux heures du matin, plusieurs bombes qui endommagèrent les
bâtiments B5 et B6 ».
André
Poirmeur
(id. page 128) : « La
nuit suivante, un avion inconnu larguait à basse altitude ses bombes
sur le camp qui endommagèrent les bâtiments B1 et B2. Les internés
ne bougèrent pas. Par expérience. Ils s'étaient persuadés qu'il
s'agissait de représailles et que des gardes-chiourmes les
attendaient à la sortie pour les massacrer. Vraisemblablement ».
Marcel
Cimier : « Les recherches pour les
retrouver restèrent vaines. Aussi les Allemands se vengèrent-t-ils »
(…) « En pleine nuit, il était à peu près une heure du
matin, tout le monde dormait, nous fumes littéralement arrachés,
soulevés de notre lit par une série d’explosions ».
André
Poirmeur mentionne deux morts, deux américains (William Johnson
et Edward Nitting), tout comme Pierre
Monjault qui raconte le bombardement «de la
part des Allemands, qui fit deux morts ».
Marcel
Cimier « deux américains trouvèrent la
mort et plusieurs autres furent blessé » et
René
Maquenhen « dans le camp américain, il
ne tomba qu’une seule bombe qui fit deux victimes ». Mais
René
Aondetto et Maurice
Foubert ont donné le
chiffre de trois morts dans des écrits contemporains de l’évènement,
ainsi que Mlle Pourvoyeur,
assistante de la Croix Rouge, dans une lettre à
Mme Varenne,
le 25 juin 1942 (fonds Georges Varenne, MRN Champigny). Henri
Gaget écrit
également "Il y eut deux morts et des blessés, dont un
mourut le lendemain ». Lettre jetée du train le 6 juillet
1942, voir ci-après.
Lucien
Colin dans le journal
qu’il tient au jour le jour entre le 9 mai et le 4 juillet a relaté
l’évasion et le bombardement. « à 1 heure ce
matin, réveil en sursaut. Un chapelet de bombes tombe pas loin. Une
heure plus tard une autre explosion. Réveil à 6 h 30. Nous
apprenons que le camp a été bombardé : chez les américains,
une bombe sur le B5 3 morts et 5 blessés. Chez nous entre le A3 et
le A4, une bombe assez grosse, à retardement qui a explosé une
heure après être tombée. Une bombe sur le A3. 2 blessés chez
nous ».
Parmi les internés, Emile Lecointre, militant communiste de Chatellerault, qui faisait partie de l'organisation illégale du camp, est blessé très gravement à l'abdomen lors du bombardement. Il mentionne également des blessés dans le camp des Russes blancs. Emmené à l'hôpital civil de Compiègne, il échappe au convoi du 6 juillet, mais sera déporté le 24 janvier 1943 pour le camp de Sachsenhausen.
Henri
Asselineau transféré
de Fontevrault par le train le lundi 21 juin 1942, arrive à
Compiègne le mardi 22 juin à 11 heures. Le jour même où a lieu la
fameuse évasion par le tunnel de militants et de dirigeants du
Parti. Il connaît le bombardement de représailles du surlendemain
matin qu’il mentionne ainsi dans sa première carte à son épouse :
un «brutal
réveil».
Georges
Varenne selon
le témoignage de Mlle Pourvoyeur,
assistante de la Croix Rouge «est
sorti indemne, alors que sa fenêtre a été arrachée et que tout a
croulé autour de lui. Retiré brusquement de son sommeil, il a porté
vivement secours à ses camarades blessés et les a transportés à
l’infirmerie».
C’est
Henri
Gaget qui
a relaté de façon la plus précise le
bombardement : « Dans
la nuit du 23 au 24, nous fûmes réveillés par une explosion
formidable après avoir entendu un avion. Celui-ci venait de lâcher
14 bombes sur le camp. Le lendemain matin, c’était beau ! Il
n’y avait plus une vitre et les bâtiments étaient dans un drôle
d’état, surtout le A3 et le A4. Une bombe à retardement avait
explosé 1 heure et demie après le bombardement et crevé les
canalisations d’eau et le courant. Dans notre camp 13 bombes
étaient tombées. Par une chance inespérée, il n’est est tombé
qu’une sur le bâtiment A3 et le A4, les autres sur le terrain. Il
n’y eut que quelques blessés légers. Il n’en fut pas de même
pour le camp américain, voisin du nôtre, où la seule bombe tomba
sur un bâtiment et explosa dans une chambre. Il y eut deux morts et
des blessés, dont un mourut le lendemain. Ce bombardement aurait pu
être terrible et c’est un miracle qu’il n’y ait pas eu plus de
morts ».
Marcel
Cimier a écrit quatre pages dactylographiées
sur le camp de Compiègne, dont deux pages sur l'évasion des 19 et
le bombardement du camp. Il a compté 12 bombes et donne des
précisions sur leur calibre. « Des séries de petites
bombes qui s’emploient contre l’infanterie avaient été lancées
et avaient fauché l’herbe telle que l’aurait fait une faucheuse
à gazon ». Il mentionne plusieurs autres grosses bombes.
« Dans notre camp, deux bombes de fort calibre tombèrent
sur un bâtiment, mais explosant sur une poutre en fer à hauteur du
plafond ne causèrent que des dégâts matériels. La seconde de
cinquante kilogrammes au moins, avait explosé entre deux bâtiments,
c’était celle à retardement dont nous avons entendu la détonation
vingt minutes plus tard. Un entonnoir de 3 mètres cinquante rempli
d’eau se dessina entre ces deux bâtiments, une chose miraculeuse
nous avait protégé car nous n’avions à déplorer que deux blessé
superficiels » De ce bombardement est attribué par la
presse locale collaborationniste à la RAF, il écrit " mais
aucun de nos camarades ne se méprit sur l'auteur de cet attentat
criminel. Les allemands devaient être furieux d'avoir raté leur
coup ! ". En fait un seul parmi les témoignages des 45.000,
Maurice
Foubert, pense qu’il
s’agit d’un bombardement anglais (3).
René
Besse in « Mille et
neuf jours » les ardents éditeurs, p.101 : « Pour
finir le camp reçut un chapelet de bombes lâchées en représailles
deux nuits après ».
René
Maquenhen raconte le bombardement de représailles
après l’évasion : "Nous ne savons pas encore si c’est
par réprimande, un avion est venu nous arroser de bombes.
Nous en avons compté douze. Quelques unes tombèrent sur les
bâtiments (…) et ce fut une vraie défaite (pour les
Allemands) car cela aurait pu être pire. Dans le camp
américain il ne tomba qu'une seule bombe qui fit 2 victimes"
(1).
René
Bordy : (lettre du dimanche soir 5
juillet, jetée du train le 6) : « Nous avons été
bombardés, c’est incroyable : il y aurait dû y avoir cinq
cent morts, il n’y en a eu que 4 ».
Claudine
Cardon-Hamet et Pierre Cardon.
Note
1 : « L’évasion fait grand bruit dans le camp et
à l’extérieur. Le général Von Stülpnagel, commandant militaire
en France, vient enquêter et annoncer des mesures de représailles »
(p. 13 du Livret réalisé par le Service Départemental de l’Oise
de l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de
Guerre), et Poirmeur page 128.
Note
2 : Il y a 24 baraques de 60 mètres de long et 15 mètres
de large, qui s’alignent selon un plan en « U ». La Luftwaffe
utilise 3 aéroports de l’Oise en 1942 (Gouvieux, Creil et
Persan-Beaumont) tous trois situés à une cinquantaine de kilomètres
au sud-ouest de Compiègne, ce qui pourrait expliquer la trajectoire
diagonale des impacts sur les bâtiments A3-A5 et B5-B6.
Note
3 : Concernant les bombardements et mitraillages aériens de
l’année 1942 dans l’Oise, la Société Archéologique et
Historique de Clermont-en-Beauvaisis les a recensés (Jean Alfroid,
compte rendus SAHC in BNF Gallica). Il y a eu 24 bombardements et 14
mitraillages. Ils sont tous attribués à la RAF, excepté celui du
24 juin : «un avion de nationalité inconnue jette des
bombes sur le camp de Royallieu, il y a trois morts et quatre
blessés » (1 232 W 3006). Le même jour la RAF a bombardé
un nœud ferroviaire important à Abancourt au sud-ouest d’Amiens.
« Au
cours de 1942, les bombardements de l'Oise n'ont été exécutés
qu'avec de faibles moyens, un ou deux avions, cinq ou six tout au
plus, volant généralement à basse altitude. Peu de bombes lancées
; souvent quelques unités, au maximum 30 à Garnies, dans l'ensemble
des bombes de petits calibres. Les usines de la Salpa à
Pont-Ste-Maxence inaugurent la série le 2 avril avec une bombe. Les
usines de St-Gobain à Rantigny, la Salpa et la Papeterie à
Pont-Ste-Maxence, la Nourylande à Venette, la Cartonnerie Chouanard
à Etouy, la Sucrerie de St-Just-en-Chaussée, reçoivent quelques
bombes occasionnant très peu de victimes et encore moins de dégâts.
Les voies ferrées sont plus particulièrement visées à Cannes le 2
mai ; à Abancourt, noeud ferroviaire important, les 24 juin et 31
juillet. Mitraillage de train et locomotives à Abancourt, Rivecourt,
Crèvecœur-le-Grand, Breteuil, Saintines, etc ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire