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Georges Prévoteau a relevé noms et matricules à Compiègne |
Matricule
« 1893 » à Compiègne et « 46015 » à Auschwitz
Georges Prévoteau est
né le 5 janvier 1895 à Orléans (Loiret) à 6 heures du matin. Il est le fils de
Louise, Alexandrine Trumeau, 24 ans et de Fernand, Edmond, Georges Prévoteau,
24 ans, employé de banque (1) son époux. Ses parents habitent 4 rue des Bons
enfants à Orléans.
Il
est domicilié 48 avenue de Clichy à Paris (18ème) au moment de son
arrestation (2).
Georges
Prévoteau épouse Elise, Marie, Ernestine Ostyn le 31 juillet 1913 à Paris 6ème.
Il a avec elle un garçon, Fernand qui nait en 1913. Georges Prévoteau est
mobilisé par anticipation (comme toute la classe 1915), le 15 décembre 1914. Il
est blessé aux deux jambes durant le conflit (11 blessures) et aura des ulcères
toute sa vie (témoignage de son fils Georges).
Le
31 août 1921, Georges Prévoteau épouse Marguerite, Rose, Violette Dujardin à
Paris 11ème. Il en a un fils, Georges, qui nait en 1924.
Son
fils Georges décrit ainsi son père : taille 1m 75, cheveux
châtains avec une légère calvitie, yeux bleus, nez fort et rectiligne, un visage
plutôt rond, une dentition en mauvais état (il porte un appareil dentaire).
Georges
Prévoteau est électricien de métier. C’est un militant communiste connu.
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L'Humanité du 17 septembre 1937 |
Il
est candidat du Parti communiste aux élections cantonales de 1937, à Saint-Valéry-sur-Somme où
il est domicilié : sa profession indiquée dans l’Humanité du 17 septembre 1937 est « commerçant ».
Georges Prévoteau possède en effet (sans doute en vertu de la loi matrimoniale
en vigueur à cette époque) deux biens, provenant de son épouse. Il s’agit de
deux biens immobiliers : un bar situé Place des Pilotes et un
immeuble dans la rue Roche-Madone à Saint-Valéry-sur-Somme.
On
sait également qu’il vit avant-guerre avec une amie, Mlle Luilier
(dossier statut du BAVCC) et qu’il travaille alors comme électricien à la
CAPRA à La Courneuve, la « Compagnie Anonyme de Production et de Réalisations Aéronautiques ».
C’est une usine d'aviation qui a racheté les installations de la « Société des Avions Bernard ».
Il
y côtoie Adrien
Humbert, un jeune militant communiste qui sera déporté comme lui à
Auschwitz. Comme cette usine est évacuée en 1940 à l’approche des Allemands, il
est possible qu’il se soit un temps replié sur Beauvais, où son emménagement est
attesté au 31 rue de Calais le 5 octobre 1941 (2).
Georges
Prévoteau est arrêté le 24 octobre 1941 à son domicile du 48 avenue de Clichy à
Paris 18ème (source BAVCC), et conduit le même jour à la prison du
Cherche-Midi. Une perquisition est menée
le 30 octobre 1941 par la police française à son bar à Saint-Valéry-sur-Somme.
Des « documents communistes,
journaux, brochures, affiches, insignes, tous antérieurs à 1939 » y sont
découverts.
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@ Mémorial de Compiègne |
Le
4 novembre 1941, il est interné au camp allemand de Compiègne, camp destiné à
l’internement des «ennemis actifs du
Reich», ouvert le 27 juin 1941, alors seul camp en France sous contrôle
direct de l’armée allemande. Il y reçoit le matricule « 1893 » (3). Le
1er mai 1942, alors qu’il est interné à Compiègne depuis près de 7
mois, le Préfet de l’Oise envisage une proposition d’élargissement le
concernant. Le commandant de la Feldkommandantur 580
à Amiens sollicite alors du Préfet de la Somme « une fiche personnelle d’après le modèle en usage » concernant
Georges Prévoteau. Dans la notice individuelle en date du 5 mai 1942 qu’il
renvoie, le commissaire principal des Renseignements généraux de la Somme écrit
que Georges Prévoteau est un « Beau
parleur, d’une intelligence au-dessus de la moyenne » mais ne
recommande pas sa libération.
A
Compiègne, Georges Prévoteau relève sur 10 pages de carnet une « Liste de noms de camarades du camp de
Compiègne », qu’il transmet à sa famille (il s’agit des matricules 283
à 3800, liste déposée au BAVCC Caen). Emile Drouillas, dit Laporte, a fait de même, malheureusement son
épouse n’a pas conservé ces documents.
C’est en partie grâce à la liste de Georges Prévoteau que
nous connaissons de nombreux numéros matricules d’internés à Compiègne et que
nous avons pu grâce à elle recouper des dates incertaines d’internement au Frontstalag 122.
Georges
Prévoteau est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942 dit
des «45000». Ce convoi d’otages
composé, pour l’essentiel, d’un millier de communistes (responsables politiques
du parti et syndicalistes de la
CGT) et d’une cinquantaine d’otages juifs (1170 hommes au
moment de leur enregistrement à Auschwitz) faisait partie des mesures de
représailles allemandes destinées à combattre, en France, les Judéo-bolcheviks responsables, aux yeux
de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin
contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire dans le
blog le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz
: 6, 7, 8 juillet 1942.
On
sait par son fils Georges, qu’il jette une lettre depuis le train à
Châlons-sur-Marne, dans laquelle il leur annonce qu’ils sont « 1200 »,
vont « vers l’Est » et que « le train allait vers Nancy ». Cette
lettre sera acheminée à sa famille par des cheminots. Lire dans le blog les Lettres
jetées du train.
Après
le départ de son père de Compiègne, son fils Georges écrit à la Croix Rouge le
4 novembre 1942 pour avoir des nouvelles de son père, mais la Croix Rouge ne
lui répond pas.
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Dessin de Franz Reisz, 1946 |
Sa
photo d’immatriculation à Auschwitz n’a pas été retrouvée parmi celles que des
membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver
de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation
d’Auschwitz.
Après
l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y
sont entassés dans deux pièces).
Le
9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau, situé à 4
km du camp principal. Le 13 juillet il est interrogé sur sa
profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs ateliers sont
sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement la moitié du
convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement et à la
construction des Blocks. Electricien de métier Georges Prévoteau revient à
Auschwitz I, affecté au Block 22 puis au Block 7.
Georges
Prévoteau entre à l’infirmerie d’Auschwitz le 3 août 1942. Il meurt à Auschwitz
le 19 septembre 1942 d’après le certificat de
décès établi au camp d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 3 page 964 et le site internet © Mémorial
et Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau).
Il
convient de souligner que cent quarante-huit «45000» ont été déclarés décédés à l’état civil d’Auschwitz les 18
et 19 septembre 1942, ainsi qu’un nombre important d’autres détenus du camp
enregistrés à ces mêmes dates. D’après les témoignages des rescapés (dont Guy
Lecrux), ils ont tous été gazés à la suite d’une vaste sélection interne des inaptes
au travail, opérée dans les blocks d’infirmerie. Lire dans le blog : Des
causes de décès fictives.
Un
arrêté ministériel du 10 décembre 1997 paru au Journal Officiel du 18 avril
1998, porte apposition de la mention «Mort
en déportation» sur les actes et jugements déclaratifs de décès de Georges
Prévotyeau. Mais il comporte une date erronée : « décédé le 8 septembre 1942 à Auschwitz
(Pologne) ». Il serait souhaitable que le Ministère prenne en compte,
par un nouvel arrêté, la date portée sur son certificat de décès de l’état
civil d’Auschwitz, accessible depuis 1995 et consultables sur le site internet du © Mémorial
et Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau. Lire dans le blog l’article
expliquant les différences de dates entre celle inscrite dans les «Death books» et celle portée sur l’acte
décès de l’état civil français) Les
dates de décès des "45000" à Auschwitz.
Son
fils cadet Georges a écrit à un rescapé (inconnu) le 3 mai 1945 pour tenter d’avoir
des nouvelles.
Georges
Prévoteau a été déclaré « Mort pour
la France » et homologué comme « Déporté politique ».. Son fils aîné Fernand, domicilié en
région parisienne, a été destinataire de la carte.
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© Site Internet MemorialGenWeb. |
Le
nom de Georges Prévoteau est inscrit sur le monument aux morts et dans l’église
de Saint-Valéry-sur-Somme.
- Note 1 :
Curiosité ! L’état civil des archives départementales numérisées du Loiret
et celles de la ville d’Orléans diffèrent ! Dans l’une le père de Georges
Prévoteau est employé de banque, dans l’autre, il est employé de bureau. On
constate en outre que le préposé à l’Etat civil de la ville d’Orléans avait
inscrit par erreur dans un premier temps (cf. archives du Loiret) le mariage de
Georges Prévoteau avec Elise Ostyn (qui a lieu le 31 juillet 1913) en mention
marginale de la naissance d’André Philippeau, né lui aussi le 5 janvier 1895 (mais
décédé en mai 1913). Puis il a inscrit correctement le deuxième mariage de
Georges Prévoteau avec Marguerite Dujardin le 30 août 1921. Une nouvelle page
du registre a été refaite en 1946, portant correctement la mention des deux
mariages et une date de décès à Auschwitz (8 septembre).
- Note 2 :
L’adresse portée sur son acte de décès à Paris 18ème, mentionnée sur
le premier registre de naissance d’Orléans est le 48 avenue de Clichy à Paris
(18ème). C’est également l’adresse qu’il indique lui-même sur la
liste des matricules qu’il a relevés à Compiègne. Mais sur son certificat de
décès à Auschwitz, il est indiqué comme adresse le 31 rue de Calais à Beauvais.
Il s’agit vraisemblablement de l’adresse de membres de sa famille.
- Note 3 :
sur le document publié plus haut son propre numéro matricule a été surchargé
par erreur. C’est bien le n° 1893 qui correspond à sa date d’arrivée à
Compiègne, et non le 1693 !
Sources
- Archives
en ligne de la ville d’Orléans et Archives en ligne du Loiret.
- @
Photo de la première page de la liste de la main de Georges Prévoteau « noms de camarades du camp de
Compiègne », collectés avant le départ du convoi et transmis à sa
famille (BAVCC).
- Fichier
national du Bureau des archives des victimes des conflits contemporains
(BAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre
1992 par André Montagne et Claudine Cardon-Hamet.
- Bureau
des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), Ministère de la
Défense, Caen : dossier individuel consulté par Claudine Cardon-Hamet.
- Correspondance
avec la nièce de Georges Prévoteau, Mme Christine Houpert.
- Bureau
des archives des victimes des conflits contemporains (Archives de Caen du
ministère de la Défense). Liste
communiquée par M. Van de Laar, mission
néerlandaise de Recherche à Paris le 29.6.1948, établie à partir des
déclarations de décès du camp d'Auschwitz. Liste Auch 1/7 (n° 31714 et n° 279).
- Liste
(incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les
historiens du Musée d'Etat d'Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des
victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant
généralement la date de décès au camp.
- Death
Books from Auschwitz (registres des morts d'Auschwitz), Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé
essentiellement sur les registres (incomplets) des certificats de décès établis
au camp d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31
décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- © Site Internet
MemorialGenWeb.
- © Site Internet
MemorialGenWeb.
- Archives de la Préfecture de police
de Paris, Cartons occupation allemande.
- © Dessin de Franz Reisz, in « Témoignages sur Auschwitz »,
ouvrage édité par l’Amicale des déportés d’Auschwitz (1946).
Biographie mise
à jour en décembre 2013 à partir de
la notice rédigée en 2002 par Claudine Cardon-Hamet pour l’exposition de Paris
de l’association «Mémoire vive». Claudine
Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : «Triangles
rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942 »
Editions Autrement, 2005 Paris et de Mille otages pour Auschwitz, le convoi du
6 juillet 1942 dit des «45000», éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé).
Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce blog) en cas
de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette
biographie. Pour compléter ou corriger cette biographie, vous pouvez me
faire un courriel deportes.politiques.auschwitz@gmail.com
Pensez à indiquer les sources et éventuellement les documents dont vous
disposez pour confirmer ces renseignements et illustrer cette biographie.
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