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Cyrille Chaumette le 8 juillet 1942 à Auchwitz |
Matricule "45.360" à Auschwitz
Cyrille Chaumette est né le 14 janvier 1915 à
Saint-Omer (Pas-de-Calais).
Il
est le fils d’Adèle, Marie, Louise Vasseur, 29 ans, lingère et de Charles,
Henri, Chaumette, 31 ans, chauffeur, son époux.
Il
est ouvrier du textile, filateur dans une filature de Saint-Omer.
"Cyrille Chaumette adhère aux Jeunesses
communistes au début des années 1930 et devient secrétaire de la section des JC
de Saint-Omer en 1934. Il joue un rôle actif dans les grèves des filatures
audomaroises de 1936 et est placé à la tête du syndicat réunifié du textile de
Saint-Omer, fonction qu’il conserve jusqu’en 1939" (Le Maitron).
Le
29 juillet 1939, à St-Omer, Cyrille Chaumette épouse Jeanne Marcelle Billaud.
La Wehmacht occupe Lille le 1er juin
1940. Le Pas-de-Calais est placé dans la « zone rouge ». L’occupant
se livre à un pillage méthodique des ressources : la majorité de la
production métallurgique, chimique, minière et textile est exportée en Allemagne.
Suspecté
d’activités clandestines, Cyrille Chaumette est arrêté par la Feldgendarmerie (Feldkommandantur
531 Aube), le 5 février 1941 (1) avec son épouse, née le 28 juillet 1921. Enceinte, Jeanne Chaumette, malgré les deux demandes que son mari et elle effectuent en juillet et septembre 1941, est internée pendant plusieurs mois à Troyes, avant d’être autorisée à habiter en ville et de pouvoir accoucher à Troyes le 22 décembre 1941. Leur fille Ginette décédera le 8 janvier 1946. Cyrille Chaumette est interné
à la prison de Saint-Omer du 5 février au 2 mars 1941.
Puis
il est transféré au centre Jules Ferry de Troyes (Aube ), une ancienne école de Troyes qui tient lieu de centre d’internement.
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Courrier du Préfet de l'Aube |
A la demande des autorités
allemandes, le Préfet fait interner Cyrille Chaumette le 4 juillet 1941 dans le
quartier allemand de la prison de Troyes. En effet dans un courrier en date du 4 juillet 1941,
le Préfet de l’Aube, Georges Hilaire répond avec célérité à un courrier - daté
du même jour - du colonel commandant la Feldkommandantur 531 de Troyes : « Conformément aux instructions contenues dans
votre lettre du 4 juillet, j’ai l’honneur de vous faire connaître que le nommé Cyrille
Chaumette, expulsé du Pas-de-Calais et hébergé au centre Jules Ferry, a été
arrêté et conduit à la prison de Troyes où il a été écroué par les soins du
chef de poste allemand. Une visite minutieuse de ses bagages restés au centre,
n’a pas permis de trouver trace d’aucune documentation ».
Il est ensuite transféré au camp
allemand de Royallieu à Compiègne (Frontstalag 122), entre le 10 et le 12
juillet 1941.
A Compiègne il reçoit le matricule n° "1175". Pour comprendre la
politique de l’Occupant qui mène à leur déportation, voir les deux articles du
blog : La politique allemande des
otages (août 1941-octobre 1942) et «une déportation d’otages».
Cyrille
Chaumette est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942 dit
des «45000». Ce convoi d’otages
composé, pour l’essentiel, d’un millier de communistes (responsables politiques
du parti et syndicalistes de la
CGT) et d’une cinquantaine d’otages juifs (1170 hommes au
moment de leur enregistrement à Auschwitz) faisait partie des mesures de
représailles allemandes destinées à combattre, en France, les Judéo-bolcheviks responsables, aux yeux
de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin
contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.
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Immatriculation le 8 juillet 1942 |
On
ignorait son numéro d’immatriculation à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet
1942. Mais le numéro «45360» (2) figurait dans son dossier aux ACVG.
Après
l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y
sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous les déportés du convoi sont conduits à pied au camp
annexe de Birkenau (Brzezinka), situé
à 4 km du camp principal. Lire
dans le blog le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz
: 6-8 juillet 1942.
Après
l’enregistrement, il passe la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y
sont entassés dans deux pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp
annexe de Birkenau, situé à 4 km du camp principal. Le 13
juillet il est interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS
ont besoin pour leurs ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz
I (approximativement la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau,
employés au terrassement et à la construction des Blocks.
Le
13 juillet, raconte Pierre Monjault : "Nous sommes interrogés
sur nos professions. Les spécialistes dont ils ont besoin pour leurs ateliers
sont sélectionnés et s'en retournent à Auschwitz-I, ils sont approximativement
la moitié de ceux qui restaient de notre convoi".
Cyrille
Chaumette est affecté à Auschwitz-1 au Kommando des installateurs, avec Clément Coudert (45402) et Henri Marti (45842)
avec lesquels il est très lié ("les trois
inséparables"). Ce Kommando a pour tâche de s’occuper des installations du
camp, notamment en matière de canalisations. Un jour où les trois amis
aménagent une de ces canalisations aboutissant à l’une des grandes chambres à
gaz de Birkenau, ils ont l’occasion de pénétrer à l’intérieur du périmètre réservé. Le
récit de leur incursion dans ces lieux interdits a été fait par Clément Coudert
et Henri Marti à l’Humanité, à leur
retour de déportation : Trois
"45000" assistent à l'ouverture des portes d'une chambre à gaz.

En
application d’une directive datée du 21 juin 1943 accordant aux détenus français
des KL la possibilité de correspondre avec leur famille et de recevoir des
colis renfermant des vivres, il reçoit le 4 juillet 1943, comme les autres
détenus politiques français d’Auschwitz, l’autorisation d’échanger des lettres
avec sa famille - rédigées en allemand et soumises à la censure - et de
recevoir des colis.
Entre
le 14 août 1943 et le 12 décembre 1943, il est en quarantaine au Block 11 avec
la quasi totalité des Français survivants. Lire l'article du blog "les 45000
au block 11. Le
12 décembre, les Français quittent le Block 11 et retournent dans leurs anciens
Kommandos.
Le
7 septembre 1944, trente "45 000"
sont transférés d'Auschwitz à Gross-Rosen où ils sont enregistrés. Cyrille
Chaumette y reçoit le matricule 40986 et Clément Coudert le 40988. Après
leur quarantaine, les "45000"
sont répartis dans divers kommandos dont une dizaine sont affectés aux
usines Siemens. Lire dans le blog , "les
itinéraires suivis par les survivants". Le 9 février 1945, le camp de Gross-Rosen est évacué vers
Dora-Mittelbau. Cyrille Chaumette y arrive avec quatorze autres « 45.000 ».
Il y est enregistré avec le n° 116.861.
Roger
Abada, René Besse, Clément Coudert, Pierre Monjault sont affectés à Nordhausen (un des Kommandos de Dora).
René Besse et Pierre Monjault s'en évadent, le 3 avril, Roger Abada, le 5, à la
faveur de bombardements alliés sur le camp. Cyrille Chaumette est transféré de Dora à Rotteleberode.
Selon
le témoignage de Gaston Jeannin (Paris 3ème), déporté à Buchenwald,
puis à Dora, Cyrille Chaumette aurait été fusillé dans la nuit du 13 au 14
avril 1945 au cours de leur tentative d’évasion à Roslau au cours de leur
évacuation vers Hanovre. Mais plus vraisemblablement selon Klaus Agartz et Georg Schoenberner, antifascistes
allemands qui ont effectué des recherche sur les victimes des évacuations dans
cette région (informations transmises à Roger Arnould par l’intermédiaire de Roger
Maria en 1984), il y avait encore deux détenus en provenance d’Auschwitz
vivants lors de l’évacuation de Rotteleberode : Ludwig Lewin et Cyrille
Chaumette : «il a fait le chemin à pieds
jusqu’à la petite ville de Niedersachhswerfen (près de Norhausen, à 16 km de Rotteleberode). Après de
nombreuses recherches dans le listes manuscrites de la S.S. des assassinés sur la
route ou dans les wagons avant Niedersachhswerfen, Klaus Agartz est convaincu
que Cyrille Chaumette est mort entre Oebisfelde et Mieste, dans le train ou à la
gare de Mieste même (il y a 80 corps non identifiés dans la fosse commune de
Mieste).
La
mention Mort en déportation est apposée sur son acte de décès (arrêté du 3
octobre 1987 paru au Journal Officiel du 14 novembre 1987). Cet arrêté porte
toutefois un lieu inexact : "décédé le 13
avril 1945 à Auschwitz".
Cyrille Chaumette a été homologué «Déporté politique».
Son
nom est inscrit sur le monument aux morts de Saint-Omer.
- Note 1 : Les département du Nord et du Pas-de-Calais sont rattachés au commandement militaire allemand de Bruxelles (Militärbefehlshaber). Pour Le
Maitron, Cyrille Chaumette est arrêté en janvier 1941. Pour Jean Marie
Fossier (FNDIRP 59), c’est en février.
Sources
- Liste
de noms de camarades du camp de Compiègne,
collectés avant le départ du convoi et transmis à sa famille par Georges Prévoteau
de Paris XVIIIème, mort à Auschwitz le 19 septembre 1942 (matricules
283 à 3800) (BAVCC).
- Bureau
des archives des conflits contemporains (BAVCC), Ministère de la Défense, Caen
(dossier individuel consulté).
Archives de l’Aube : Archives du bureau de liaison entre les autorités allemandes et
les services de la préfecture (1940-1944).
- Le Maitron, Dictionnaire biographique du
mouvement ouvrier français, Claude Pennetier (dir), éditions de l’Atelier,
CD-Rom édition 1997. Maitron en ligne, notice Yves Le Maner.
- © Photo de la porte d’entrée du camp d'Auschwitz : Musée
d’Auschwitz-Birkenau.
- © Site Internet
Mémorial-GenWeb.
- © Site Internet Légifrance.gouv.fr
- Photo d'immatriculation à Auschwitz : Musée d'état
Auschwitz-Birkenau / collection André Montagne.
- © Archives
en ligne de l’Aube, Archives du bureau de liaison entre les autorités allemandes
et les services de la Préfecture (1940-1944).
- © Archives
en ligne de Saint-Omer.
Notice biographique rédigée en 2003, complétée en 2012 et 2018 par
Claudine Cardon-Hamet, docteur en Histoire, auteur des ouvrages : « Triangles rouges à
Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 », Editions Autrement, 2005
Paris et de «Mille otages pour Auschwitz,
le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein,
Paris 1997 et 2000. Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées
de ce blog) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de
cette notice. Pour la compléter ou corriger, vous pouvez me faire un
courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com
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