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Jean Bouscand à Auschwitz |
Matricule "45292" à Auschwitz
Jean Bouscand est né le 17 février 1893 à Bagnot (Côte d’Or). Il habite au 20-22, rue Magenta à Dijon (Côte d’Or) au moment de son arrestation.
Jean
Bouscand est le fils de Louise Bouscand, 31 ans, manouvrière.
Il
habite à Dijon (Côte d’Or) au moment du Conseil de révision. Le métier qu’il
exerce alors a été raturé (illisible) sur son registre matricule militaire et
remplacé par « employé au PLM ». Ce registre nous apprend qu’il
mesure 1m 68, a les cheveux châtain, les yeux « bleu jaunâtre »,
le front moyen vertical, le nez moyen rectiligne, le visage ovale. Il a un
niveau d’instruction n° 3 (possède une
instruction primaire supérieure).
Conscrit
de la classe 1913, Jean Bouscand s’est engagé volontairement pour quatre ans le
11 octobre 1912 à la mairie de Dijon. Il est affecté au 12ème
Régiment de Hussards où il arrive le 1er novembre 1912. Il est
blessé à la nuque et au ventre par éclats d’obus le 10 octobre 1914 lors de l’attaque
du village de Foncquevillers (après la défaite de l’armée allemande sur la
Marne et son repli sur l’Aisne, c’est la « course à la mer. Il s’agit pour
les Franco-britanniques de prendre à revers l’aile de l’armée adverse située le
plus au nord, pour réaliser une manœuvre d’encerclement). Jean
Bouscand est nommé brigadier le 3 avril 1915.
Il
passe au 2ème Régiment Léger le 1er juin 1916. Il passe
au 108ème Régiment d’Artillerie Lourde le 16 août 1916. Il est nommé
maréchal des logis le 10 janvier 1918. Il passe ensuite au 131ème
Régiment d’Artillerie lourde le 1er mars 1918.
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croix de guerre |
Il
est cité à l’ordre du jour n° 9 du régiment le 8 septembre 1918 : « excellent chef de pièce, qui maintes fois a
fait preuve d’énergie, de dévouement, notamment en juin 1917 où blessé, il
refusa d’être évacué, et en août 1918 où dans des circonstances très pénibles a
fait preuve du plus grand courage ». ses campagnes contre l’Allemagne sont
comptées du 4 août 1914 au 12 janvier 1919. Il est décoré de la croix de
guerre.
Il
est mis à la disposition des Chemins de fer PLM le 13 janvier 1919 comme homme
d’équipe… et démobilisé le 16 août 1919 « certificat de bonne conduite
accordé », il passe ainsi dans la Réserve comme « affecté spécial » aux
chemins de fer de campagne.
Il épouse Suzanne Simonnet en décembre 1920 à Dijon.
Il
épouse en secondes noces Jeanne Dion le 28 décembre 1922 à Dijon.
En 1925, il adhère au Parti
communiste (la cellule 26 de Dijon dont Valentin Rabier était secrétaire).
Il est secrétaire du Comité
départemental et de la section communiste de Dijon et devient gérant du journal
communiste : « Le Travailleur de Bourgogne ».
En 1927 il est conducteur au PLM et habite au 57 rue Saumaise à Dijon.
En novembre 1930, il a déménagé au 22 rue Magenta à Dijon.
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Une de "l'Humanité" du 9 juillet 1932 |
En juillet 1932, il est à la tête d'une manifestation organisé par le Comité de lutte contre les préparations de guerre, à l'occasion de manœuvres militaires aériennes sur la base de Dijon qui devaient faire participer la population. Il prend la parole du haut du kiosque à musique de la place Wilson, malgré l'intervention de policiers.
En 1933, il est secrétaire du syndicat CGTU des cheminots de Dijon.
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Elections au Conseil supérieur in "Rouge Midi" 10 février 1934 |
En 1934, il est chef de train au PLM (SNCF, dossier n° 44295, catégorie A) et candidat aux élections du Conseil supérieur des Transports (plusieurs décrets de 1934 substituent le Conseil Supérieur des Transports au Conseil
Supérieur des Chemins de fer créé en 1921 et au comité de Coordination de 1934).
« Il fut candidat communiste
aux élections législatives de mai 1932 (à Châtillon-sur-Seine) et d’avril-mai
1936 (2e circonscription de Dijon), aux élections cantonales d’octobre 1934 (Dijon-Sud),
enfin tête de liste aux élections municipales en 1934 et 1935.
En 1935, il
arriva en deuxième position sur la liste communiste derrière Auguste Heinimann,
obtenant 912 voix sur 17.926 votants.
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Elections cantonales d'octobre 1937. Sur cette même liste figure Armand Saglier qui sera également déporté à Auschwitz |
Très actif pendant la période du Front populaire comme secrétaire régional du
PC (Côte-d’Or et Yonne), Jean Bouscand prit la parole dans de très nombreux
meetings et écrivit les éditoriaux du Travailleur de Bourgogne dont
il était administrateur.
A l’automne 1940, il reconstitua le PC clandestin en Côte d’Or avec Jean Mahon (1).
Il fut dénoncé le 13 avril 1940 par une lettre anonyme envoyée à la Préfecture
et au commissaire spécial de Dijon comme se livrant "à la propagande
soviétique après des permissionnaires "(in Le Maitron, édition electronique, notice de Pierre Lévêque).
Jean Bouscand est arrêté le 22 juin 1941 par la police allemande (le 22 juin 1941, jour de l’attaque hitlérienne contre l’Union soviétique, sous le nom « d’Aktion Theoderich, les Allemands arrêtent dans la zone occupée et avec l’aide de la police française,», plus de mille communistes. D’abord placé dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy (pour ceux de Côte d'Or, les prisons de Dijon, puis de Vesoul) pour ceux de Dijon, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré par la Wehrmacht (le Frontstalag 122) et qui ce jour là devient un camp de détention des “ennemis actifs du Reich”.
Jean Bouscand est interné à Compiègne le 5 juillet 1941.
Depuis le camp de Compiègne, il va être déporté à
destination d’Auschwitz.
Bien qu'atteint de tuberculose, Jean Bouscand est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 ». Ce convoi d’otages composé, pour l’essentiel, d’un millier de communistes (responsables politiques du parti et syndicalistes de la CGT) et d’une cinquantaine d’otages juifs (1170 hommes au moment de leur enregistrement à Auschwitz) faisait partie des mesures de représailles allemandes destinées à combattre, en France, les « judéo-bolcheviks » responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941. Lire
dans le blog le récit des deux jours du transport : Compiègne-Auschwitz
: 6-8 juillet 1942.
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Auschwitz le 8 juillet 1942 |
Il est enregistré à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942 sous le numéro "45292".
Sa
photo d’immatriculation à Auschwitz (2) a été retrouvée parmi celles que des
membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver
de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation
d’Auschwitz.
Lire
dans le blog le récit de leur premier jour à Auschwitz : L'arrivée
au camp principal, 8 juillet 1942. et 8
juillet 1942 : Tonte, désinfection, paquetage, "visite médicale"
Après l’enregistrement, il passe
la nuit au Block 13 (les 1170 déportés du convoi y sont entassés dans deux
pièces). Le 9 juillet tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau,
situé à 4 km du camp principal. Le 13 juillet il est
interrogé sur sa profession. Les spécialistes dont les SS ont besoin pour leurs
ateliers sont sélectionnés et vont retourner à Auschwitz I (approximativement
la moitié du convoi. Les autres, restent à Birkenau, employés au terrassement
et à la construction des Blocks.
Il meurt à Auschwitz le 11 août 1942 d’après les registres du camp.
Jean Bouscand est homologué "Déporté politique". Il est homologué au titre des
Forces Française de l’Intérieur (FFI) comme appartenant à l’un des
mouvements de Résistance dont les services justifient une pension militaire.
Son nom est honoré sur deux plaques.
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Plaque quartier du Stand |
L'une dans le quartier des Poussots (relevé Genweb © Serge Recorbet, l'autre (ci-contre) sur le mur d'enceinte de
l'hôpital Bocage - A la mémoire des héros
de la Résistance du quartier du Stand victimes de la barbarie nazie - relevé © Jean-Pierre Petit.
Note 1 : "Le 11 décembre 1940, les premiers groupes
de l’Organisation Spéciale (O.S.). dirigés par Jean
Mahon,
Chalon et Grillot, font dérailler un train de marchandise entre le poste 2 de
Perrigny et le poste 2 de Longvic, détruisant quatre citernes de vin destiné
aux Allemands et coupant la voie pendant 14 heures". Albert Ouzoulias
mentionne encore deux autres déraillements, les 3 et 13 janvier 1941, puis, «de
janvier à juin 1941, ces mêmes groupes (réalisent) des récupérations d’armes et
d’explosifs, la remise en état des armes et la fabrication d’engins dans les
ateliers du dépôt.»
De septembre au 15
octobre, avec un effectif de 24 hommes, le groupe de l'O.S. s’attaque aux
locomotives, par sablage des boîtes à huile. La police militaire allemande
soupçonne Jean Mahon, Jean Bouscand et Gabriel Lejard de coordonner les
opérations de sabotage au dépôt de Perrigny, mais n’en possède pas de preuves.
- Note 2 : 522 photos d’immatriculation des
« 45000 » à Auschwitz ont été retrouvées parmi celles que des
membres de la Résistance intérieure du camp avaient camouflées pour les sauver
de la destruction, ordonnée par les SS peu de temps avant l’évacuation du camp d’Auschwitz. A la Libération elles ont été conservées dans les
archives du musée d’Auschwitz. Des tirages de ces photos ont été remis par
Kazimierz Smolen à André
Montagne, alors vice-président de l'Amicale
d'Auschwitz, qui me les a confiés.
Sources
- Témoignage de Gabriel Lejard (textes et cassette enregistrée en 1988).
- Archives nationales F7/13686; « Le travailleur de Bourgogne », (articles 1933-39)
- « L'Avenir de la Côte d'Or » (2 juin 1945).
- Photo immatriculation à Auschwitz identifiée par Gabriel Lejard à la FNDIRP.
- Archives municipales de Dijon : lettre du conservateur, Mme Degroise du 18 sept. 1991.
- Listes - incomplètes - du convoi établies par la FNDIRP après la guerre (archives de la F.N.D.I.R.P).
- Fiche FNDIRP remplie par sa veuve (N° 21488 / 8387), qui en réfère aux témoignages de deux rescapés
- Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres - incomplets – de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
- Fichier national de la Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), Ministère de la Défense, Caen.
- Liste (incomplète) par matricule du convoi du 6 juillet 1942 établie en 1974 par les historiens du Musée d'Etat d'Auschwitz-Birkenau (Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (Ministère de la Défense, Caen) indiquant généralement la date de décès au camp.
- "Livre des déportés ayant reçu des médicaments à l'infirmerie de Birkenau, kommando d'Auschwitz" (n° d'ordre, date, matricule, chambre, nom, nature du médicament) du 1.11.1942 au 150.7.1943.
- (1) Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, Le Maitron, Claude Pennetier (dir), éditions de l’Atelier, CD-Rom. Tome 20, page 152, article de Pierre Lévêque
Etat
civil et Registres matricules militaires de la Côte d’Or en ligne.
- L'Humanité, cantonales d'octobre 1937.
Biographie rédigée en février 1998 et complétée en 2015 et 2017 par Claudine Cardon-Hamet (docteur en Histoire, auteur des ouvrages : Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Graphein, Paris 1997 et 2000 (épuisé) et de Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 juillet 1942 dit des « 45000 », éditions Autrement, Paris 2005). Prière de mentionner ces références (auteur et coordonnées de ce blog) en cas de reproduction ou d’utilisation totale ou partielle de cette biographie.
Pour compléter ou corriger cette biographie, vous pouvez me faire un courriel à deportes.politiques.auschwitz@gmail.com
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